Les récents événements montrent que la police ne laisse personne indifférent. D’un côté, les séries policières nourrissent souvent un idéal de justice et d’efficacité. De l’autre, chacun craint l’amende ou le contrôle routier ; le proverbe « pas vu, pas pris » résonne dans nos têtes. Pour couronner le tout, les nouvelles récentes des émeutes, des conversations racistes et de courses-poursuites mortelles.
Cette dualité s’incarne dans le débat public : certains réclament une force musclée, presque façon Rambo, tandis que d’autres voudraient des agents pacifistes, presque animateurs de centre aéré. Nous attendons de la police une exemplarité absolue, une attente légitime… mais juste impossible à atteindre.

Dans nos démocraties, la police détient le monopole de l’ordre et de la violence légitime. Elle doit maintenir la paix par tous les moyens nécessaires : prévention et médiation, formation continue, communication et dialogue, gestion de conflits, usage exceptionnel de la force. Ces missions sont à la fois nobles et périlleuses, car nous oublions trop souvent que nos libertés et notre prospérité ne sont pas des acquis éternels.
Mettons-nous un instant dans la peau des policiers confrontés aux violences, trafics et agressions en tous genres. À force de se trouver face aux mêmes infractions commises par le même type d’individus, même le plus altruiste des agents ressentirait un tiraillement entre son idéal et la triste réalité. Cet état de fait pèse sur le moral et explique en partie les dérives constatées au sein des forces de l’ordre. Cela ne justifie rien mais éclaire l’impact corrosif de l’exposition prolongée au danger et à la souffrance.

La police a le rôle de maintenir et garder cette frontière mouvante entre maintien de l’ordre et anarchie que nous avons instaurée, équilibre toujours instable qui peut pencher vers trop ou pas assez. Nous lui demandons de protéger nos acquis démocratiques, notre sécurité, notre mode de vie parfois par l’emploi de la force. Nous attendons d’elle une exemplarité parfaite mais nous devons reconnaître qu’au-delà de l’uniforme, ce sont des hommes et des femmes, fiers d’un idéal, prêts à se battre pour la société. Infaillibles, ils ne le sont pas ; humains, ils le sont trop, et c’est là toute la difficulté de leur mission.
Face à la complexité du maintien de l’ordre, il n’existe pas de modèle parfait. Notre devoir collectif est de soutenir la police dans son rôle exigeant : lui offrir les moyens de son action, renforcer la formation, promouvoir la transparence, tout en préservant l’équilibre mental de ceux qui, chaque jour, tiennent cette frontière entre maintien de l’ordre et anarchie. Alors la prochaine fois au lieu de critiquer, de dire « y a qu’à, faut qu’on », si nous allions plutôt demander sur le terrain à nos agents de quoi ils ont vraiment besoin pour garder notre société démocratique, prospère et ouverte.